Le tramway épargne le cœur de la Belle de Mai dans les nouvelles études de la métropole
Poussée par la Ville, la métropole a planché sur la traversée du noyau villageois de la Belle de Mai. Le passage du tramway pourrait préserver les rares commerces du quartier et offrir un large "espace apaisé" autour de la place Caffo. Toutefois, il entraîne toujours la démolition de plus d'une centaine de logements.
On ne le dira jamais assez : dans la vie, faire des études peut être utile. Marsactu a pu consulter la synthèse d’une des dernières études de tracé du tramway de la Belle de Mai. Elle lève quelques obstacles sur la route de ce projet inscrit dans le plan “Marseille en grand”. À l’horizon 2030, cette ligne de transport en site propre doit traverser Saint-Mauront et la Belle de Mai, du terminus d’Arenc à la place Burel. Ouvrant la voie à un désenclavement du 14e arrondissement, l’un des secteurs les plus peuplés de la ville. Mais cette traversée des 2e et 3e arrondissements n’est pas sans conséquence, notamment sur l’habitat. La démolition de quelque 150 logements serait nécessaire pour faire passer la double voie ferrée.
Depuis les premières annonces de tracé, en 2023, cette perspective a provoqué une levée de boucliers à la fois des riverains et des élus du secteur. Le maire de Marseille, Benoît Payan (divers gauche), s’était fendu d’un courrier, écrit la main sur le cœur, pour dire son attachement à l’habitat ouvrier appelé à disparaître, tout comme plusieurs commerces. Le maire de secteur socialiste, Anthony Krehmeier, avait demandé de nouvelles études pour préserver le noyau villageois. La métropole avait donc topé pour examiner ces tracés alternatifs, à même de “garantir le maintien de cet îlot”.
Le tracé initial prévoyait une boucle après la place Caffo.
Le noyau villageois préservé
Le tracé initial, présenté en conseil métropolitain en décembre 2024, prévoyait la démolition de neuf commerces et 22 logements, inclus dans 17 parcelles représentant 2 000 mètres carrés. On compte pas moins de deux bars, une pharmacie, deux boulangeries et deux salons de beauté sur ces quelques mètres de rue, dans le prolongement de la place Caffo. L’emprise libérée par ces démolitions permettait de faire passer les deux voies de tram, d’insérer les quais de la station Caffo et de faire passer en sus une voie carrossable permettant de relier la rue Belle-de-Mai à la rue Loubon.
Les commerces du cœur de la Belle de Mai devraient être préservés. (Photo : B.G.)
À la sortie de la Rue Loubon, les deux voies de tram se séparaient, avec d’un côté une voie montante vers Burel via la rue Léon-Perrin et une voie descendante, via la rue d’Orange. Dans le nouveau scénario concocté par les cabinets d’étude, la double voie de tramway ne passe plus par ce segment commercial de la rue Loubon et épargne donc le cœur du quartier.
Le nouveau scénario de tracé fait passer la voie descendante par la traverse du Bon-Secours puis le boulevard Cabasson avant de rejoindre la place Caffo via le boulevard de la Révolution, en longeant l’église en béton de la paroisse Belle de Mai.
Le tramway devrait emprunter l’étroit boulevard de la Révolution pour rejoindre la place Caffo. (Photo : B.G.)
Cette option a pour effet de limiter l’impact sur le noyau villageois. La parcelle de 200 mètres carrés affectée par le projet fait le coin entre le boulevard de la Révolution et celui de Cabasson. Cela représente dix fois moins de superficie démolie que dans la variante initiale. Il reste une inconnue sur le positionnement des quais de la double station, de part et d’autre de la rue Loubon. La proximité avec le cinéma Le Gyptis rend complexe un scénario dans lequel les deux quais de la station seraient face à face.
Ce scénario de moindre impact sur la place Caffo a également des répercussions sur le trafic routier de la rue Loubon. Il exclut le passage de bus sur cette rue sinueuse, empruntée aujourd’hui par les lignes 31, 32, 33 et 34, qui charrient un nombre important de voyageurs entre le centre et le nord de la ville. Le document consulté par Marsactu prévoit à cet horizon leur remplacement par deux nouvelles lignes, dans le cadre de la refonte globale au compte-gouttes du réseau. Elles emprunteraient un itinéraire différent pour rejoindre le centre, en passant devant la Friche La Belle de Mai.
Impact foncier toujours sensible rue Loubon
En revanche, cette variante ne permet pas de diminuer le nombre de démolitions prévues sur le reste du tracé, notamment sur l’îlot bâti qui fait face au cinéma Le Gyptis ou, plus bas, au moment de se raccorder au boulevard National. L’hypothèse d’une circulation alternée sur une voie unique sur une portion de la rue Loubon, qui devait pourtant faire l’objet “d’analyses approfondies“, n’est même pas évoquée.
“À noter que l’optimisation de largeur de la plateforme permise par la suppression de la mixité bus [tramway] rue Loubon ne permet malheureusement pas de diminuer l’impact foncier en dehors du secteur de la place Caffo. Cette optimisation permet en revanche un gain en matière d’espaces publics avec environ 1000 mètres carrés supplémentaires le long de la rue Loubon.”
Ce scénario a pour effet d’élargir la “zone apaisée“, autour de la place Caffo sur près de 5 000 mètres carrés, avec une vingtaine d’arbres replantés.
Outre le bâti démoli, la traversée du quartier aura des effets non négligeables sur le plan de circulation du quartier. Le passage du tramway dans certaines artères aura pour effet de déporter le passage des véhicules à moteur sur d’autres rues, aujourd’hui peu fréquentées. Or, la Belle de Mai est encore aujourd’hui un quartier fort fréquenté par les automobilistes qui rejoignent le centre-ville depuis le secteur Nord. La rue Loubon pourrait ainsi accueillir une circulation “tête-bêche”, avec un sens unique différent entre la partie sud et la partie nord de la rue. Mais cette question du trafic routier, de la place du stationnement ou du passage des voies cyclables pèse peu face aux centaines de logements qui risquent encore d’être démolis pour faire passer le tramway.
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